je veux encore rouler des hanches,

je veux me saouler de printemps

je veux m'en payer des nuits blanches

à cœur qui bat, à cœur battant

avant que sonne l'heure blême

et jusqu'à mon souffle dernier

je veux encore dire "je t'aime"

et vouloir mourir d'aimer

Barbara

dimanche 23 août 2009

Douglas Kennedy : Quitter le monde

"Il faut continuer, je ne peux pas continuer, je vais continuer.” Cette citation de Samuel Beckett, Jane, l'héroïne de ce roman, la distille tout au long de son existence. Sous couvert d'un excellent best seller où plutôt dans le best seller, style où il excelle, Douglas Kennedy nous décrit la société américaine. Rien n'est épargné de ses fausses valeurs : argent, religion, pouvoir de changer le monde, éducation, littérature. Tout y est et c'est d'autant plus surprenant qu'il reste méconnu aux Etats Unis et qu'il n'y vit plus.
Nous suivons la descente aux enfers de Jane, nous nous attachons à ce personnage fragile
et trop intelligente pour ce monde de brute.
Son entrée dans le monde se fait un soir au restaurant entre ses parents et leur énième dispute : non elle ne mariera pas et n'aura jamais d'enfants. Voilà à la suite de ça, son père quittera la maison et sa mère la tiendra responsable. Voilà est on maître de sa destinée ?
Toute sa vie Jane vivra avec cette culpabilité et ses actions découleront de ce sentiment que rien de bon ne peut venir d'elle.
Et pourtant elle aura une vie, se perdra dans des drames insurmontables et sans cesse la vie reviendra quel que soit le prix à payer.
Très belle leçon de philosophie, psychologie avec même une énigme policière à la fin qui aidera Jane à mettre la tête hors de l'eau.
C'est bien ficelé, bien mené, le suspense est bon même si parfois c'est agaçant dans la globalité de tous les thèmes chers à l'auteur. C'est vrai que la société américaine est décevante mais bon....
J'ai beaucoup aimé par contre les références littéraires de l'auteur (enfin de Jane) et les critiques musicales sont très pertinentes.
On passe un bon moment à la lecture de ce roman.

mercredi 19 août 2009

Yasushi Inoué : Le fusil de chasse

C'est un récit bref étonnant qui a reçu en 1950 le Prix Akutagawa, la plus prestigieuse récompense littéraire du Japon.
Au centre du récit un homme solitaire avec son fusil de chasse, omniprésent et son histoire racontée dans trois lettres qu'il a reçu après la mort de sa maîtresse.
C'est l'histoire de la liaison de cet homme marié, Josuké, avec une femme divorcée mère d'une fille et cousine de sa femme légitime.
Trois lettres pour retracer l'histoire d'un amour adultère, une passion secrète, une tragédie.
Celle de la fille qui a eu connaissance de la liaison de sa mère avant sa mort, de l'épouse qui l'a toujours su, de la maîtresse qui décide de mourir. Chacune avec ses mots raconte comment elle a vécu cet amour caché, inconnu de tous. Chacune à sa façon a payé cher cette histoire d'amour interdite.
Un texte magistral écrit avec sobriété, distance bref un japonais dans ce qu'il y a de plus beau.
Des pages à lire avec émotion, à relire en savourant cette littérature japonaise capable de nous offrir des chefs d'oeuvre d'une telle intensité. C'est d'autant plus parfait que le texte est d'une brièveté douloureuse.

lundi 10 août 2009

Françoise Henry : La lampe

L'histoire raconte celle d'une jeune femme, couturière, pendant l'occupation. Un récit bref d'une grande sobriété retrace quelques jours et quelques nuits d'hiver dans la non existence de cette femme. Une lampe qu'elle laisse allumée tous les soirs, malgré le couvre feu, dans la nuit de sa vie. Françoise Henry avec des mots d'une grande sensibilité nous raconte les détails d'une vie de solitude. Comment devient on si seule, comment peut on penser que personne ne nous aimera, comment peut on s'exclure ainsi de la vie et s'oublier ? Tout ceci arrive facilement, un jour on se rend compte qu'on est seule et que la vie tourne sans vous. Même son prénom elle l'a oublié comme elle a oublié le regard d'un homme sur elle. Elle est devenue Cousine Bobine pour les autres, pour elle. On lui apporte des morceaux de tissu et c'est le rêve qui entre chez elle.
L'écriture est toute en retenue et nous captive par ces détails d'une terrifiante exactitude. La description de cette solitude nous bouleverse.
La vie d'une petite couturière que l'amour, la vie ont oubliée et à laquelle personne ne songe vraiment.
Ce texte nous émeut d'autant plus que la fin est d'une violence extrême par rapport à cette vie de presque rien où tout pourtant était à venir.
Très beau.



mardi 4 août 2009

Paul Auster : Le voyage d'Anna Blume

Anna Blume, 19 ans, part à la recherche de son frère, journaliste dont elle est sans nouvelles. Elle arrive dans une cité de fin de monde où tout se désagrège, les maisons tombent en ruine, les morts encombrent les rues, les vivants deviennent des humains monstrueux. De cette cause apocalyptique on ne sait rien, ni raisons, ni coupables.
De ce voyage au bout de l'horreur et du désespoir, Anna écrit une lettre à un ami resté au delà des océans. Dans un récit halluciné et parfois incohérent elle raconte le quotidien qui bascule, la violence qui s'installe, la misère et l'horreur de ne pas pouvoir s'en échapper .
Dans la cité fermée où rien ne sort, Anna essaie de survivre avec courage en ramassant les ordures, les rencontres la conduiront dans les dédales d'un univers en perdition où les normes connues n'existent plus. Des hommes courent à en mourir, d'autres sautent des toits ou cherchent à manger dans les poubelles et dorment dans les rues.
Ce texte est absolument magnifique et dérangeant. Il dérange parce que la lettre d'Anna envoyée du bout du monde arrive quand même quelque part, quelqu'un la lit, Anna a raconté l'horreur d'une réalité.
Les hommes qui vivent dans cette cité misérable ne peuvent pas en sortir, ils doivent s'adapter ou mourir. A travers les lignes qu'Anna écrit on a l'impression de le connaître ce monde en perdition qui broit les plus faibles.
L'écriture devient obsédante à mesure que la description de la cité se met en place et que l'on constate de toutes les possiblités dont l'homme est capable pour sa survie.
Comme toujours Auster nous entraîne dans son monde habituel entre réel et imaginaire avec talent et on le suit.
Un très bon livre un peu déprimant mais sublime.





lundi 3 août 2009

Margaret Mazzantini : Ecoute moi

Un père est au chevet de sa fille de 15 ans, Angela, plongée dans le coma suite à un accident de scooter. Il est un éminent professeur de chirurgie et connaît la gravité de l'état de sa fille, les mots utilisés et surtout ceux qui sont tus. Alors dans une ultime confession pour ne pas perdre le dernier lien avec sa fille, il lui parle, il se parle et évoque sa vie et sa passion pour une autre femme, Italia, qu' il a connue juste avant sa naissance. Histoire d'une vie, de la passion d'une vie. Sans pathos, sans clichés, avec une réelle sincérité et une authentique émotion, l'auteur écrit des mots d'une grande poésie.
Parce que sa fille ne lui répond pas il entame avec elle une conversation qui ne demande ni réponse, ni pardon. Le constat d'une vie est terrible, les mots douloureux pour expliquer que son rôle d'époux, de père ne lui correspondait pas, qu'il aimait ailleurs, qu'il aimait même très fort tout en luttant contre cette passion.
Il évoque jusqu'au bout de la nuit, les choix ou plutôt les non choix de sa vie. Capable de beaucoup par amour, il est aussi capable de trop par négligence ou confort et le destin encore une fois va choisir pour lui une dernière fois.
Il s'apercevra trop tard de cet amour immense qu'il porte à cette femme, Italia, elle restera sa part d'ombre et de chagrin à jamais.
Très belle évocation de la vie que l'on accepte par raison et de la découverte d'un amour possible dans un ailleurs impossible. Avec beaucoup de délicatesse le père explique la douleur de l'oubli de soi et des errements provoqués par le refus de l'amour vrai.
Un très grand livre dans une écriture toute en finesse et sensibilité comme le témoignage d'un homme que l'amour a révélé.

dimanche 2 août 2009

Françoise Henry : Juste avant l'hiver

Ecrit comme un long monologue d'une redoutable efficacité, ce roman interpelle par l'intensité de cette voix qui vibre et souffre tout au long d'un témoignage douloureux.
La voix qui raconte et qui nous accompagne est celle de la patronne d'un café à Prague en 1969.
Voyeuse et jalouse, cette femme aigrie raconte l'histoire d'Anna, jeune serveuse de 20 ans travaillant dans son établissement. Elle a fui son pays rêvant d'un nouveau départ. A travers l'histoire d'Anna c'est sa propre vie que la patronne nous livre, bribe par bribe, dans un souffle avec une extrême pudeur.
A Prague en 1969, l'Histoire est en marche et écrase les hommes, les broit et dans des souffrances inimaginables leur enlève leurs derniers rêves. Dans cette Histoire même l'amour ne peut exister.
C'est dans ce pays sous haute surveillance qu'Anna vit sa première passion d'amour avec un étudiant, elle ne sait pas encore que ce sera son plus grand chagrin d'amour.
Antipathique au début du récit, cette voix finit par nous émouvoir et nous bouleverser. Elle regarde naître un amour avec envie elle connaît la souffrance d'Anna, elle l'a vécu aussi.
La vie ne pourra plus jamais lui redonner tout ça, l'amour ne viendra plus.
Ce témoignage nous touche par la simplicité et le ton de cette voix très efficace dans le constat qu'elle fait de sa vie, de la vie.
Un très beau livre d'une grande sensibilité.