je veux encore rouler des hanches,

je veux me saouler de printemps

je veux m'en payer des nuits blanches

à cœur qui bat, à cœur battant

avant que sonne l'heure blême

et jusqu'à mon souffle dernier

je veux encore dire "je t'aime"

et vouloir mourir d'aimer

Barbara

vendredi 30 avril 2010

Paul Auster : Invisible

Le dernier Paul Auster nous montre une fois de plus le talent romanesque de cet auteur.
Oeuvre de fiction, oeuvre d'un écrivain amoureux des mots et de la construction littéraire et qui sait nous entraîner dans les labyrinthes intérieurs de ses héros.
C'est l'histoire d'Adam Walker en 1967, étudiant de 20 ans, beau, ténébreux et ambitieux. Il sera poète. Sa route croise celle d'un couple, Born et Margot plus âgés que lui, en tout cas plus diaboliques. Born propose de financer un journal littéraire dont Adam serait le rédacteur en chef et Margot devient sa maîtresse. Un soir alors qu'il se promène avec Born, Adam est le témoin d'un meurtre, sa vie est à jamais bouleversée.
Le récit se poursuit 40 ans plus tard, avec Jim un auteur reconnu ( le double d'Auster sans doute) qui reçoit le manuscrit d'Adam. Ils se sont connus tous les deux pendant leurs études. Jim a réussi dans l'écriture tandis qu'Adam a pris d'autres voies.
A travers le récit de Jim et celui d'Adam, le lecteur apprend la destinée des protagonistes qui ont plus ou moins accompagnés sa vie.
Paul Auster met en place une véritable construction d'histoires qui ne s'emboîtent pas toujours correctement et le lecteur s'y perd avec un immense plaisir.
Nous retrouvons comme toujours le récit dans le récit, l'histoire dans l'histoire. Tout se met en place progressivement et la fin nous apporte toute la complexité de l'auto-fiction, ses limites avec la réalité.
Les personnages ne sont pas ceux que l'on croit et comme chaque fois les thèmes chers à Auster nous questionnent toujours sur l'identité, la crédibilité de l' écrivain face à son histoire mais aussi la mélancolie, la solitude, la folie.
Qui sont vraiment les personnages ? Que recherchent-ils ? Ont ils vécu leur vie ou bien se sont ils seulement racontés des histoires ?
Invisible, voilà ils sont plus qu' invisibles, porteurs d'illusions trop grandes ils deviennent presque transparents quand la réalité les rattrapent.
Visiblement un excellent livre.



François Rivière : L'usine à rêves

Retiré du monde dans sa villa dans le sud de la France, Charles reçoit un jour une lettre de Belgique écrite par Nilo mourant. Avec ce courrier resurgissent les souvenirs enfouis. Dans une autre vie, Charles a été un enfant-acteur et a connu une gloire fulgurante à Hollywood. Héros d'une série télévisée à succès, il était Little Charlie, un très jeune détective. C'était Hollywood des années 50, le rêve américain n'était pas encore devenu cauchemar. Amour, gloire et beauté. Un drame a interrompu brutalement cette prometteuse carrière et Charles est rentré au pays en essayant d'oublier. Ne lui restent que les bobines super 8 qu'il passe en boucle et qui lui rappellent qu'il était célèbre. Entre présent et passé, de la France en Belgique en passant par Hollywood, Charles se rappelle son passé et va tenter auprès de Nilo à faire ressortir les zones d'ombre qui l'ont à jamais empêché de vivre.
C'est une histoire très sensible, très touchante. J'ai aimé ce côté insouciant des choses, de la vie menée par Charles et son entourage, par ce couple d'anglais qui l'a propulsé dans la carrière. Ensuite l'atmosphère devient plus sulfureuse. C'est l'envers du décors. Les adultes ne sont pas vraiment brillants quand ils se servent des enfants pour assouvir leur fantasmes. Quand les enfants jouent aux adultes devant et même derrière la caméra. Même si les seuls effets spéciaux étaient pour ces enfants-star une épaisse couche de fond de teint, une perruque et un costume, l'univers pour eux était faussé. Pour Charles la vie est devenue sexe, alcool et mensonges. Clap de fin.
François Rivière a une écriture fine et sensible pour nous décrire avec précisions et plein de détails l'univers du cinéma. L'ambiance rétro et l'époque révolue de Hollywood des années 50 ajoutent un certain charme au livre.
Les thèmes abordés sont douloureux et l'auteur ne tombe jamais dans le sordide.
C'est vraiment une lecture très agréable même si j'aurais aimé le héros avec plus de personnalité, de force dans ses décisions ou ses silences.

dimanche 25 avril 2010

Patricia Tyrrell : Ton sang ne sautait mentir

Alors qu'elle campait avec ses parents, Cate 3 ans, a été kidnappée par Lester, un marginal en mal d'amour et d'enfant. 12 ans ont passé et Lester n'arrive plus à "éduquer" Cate. Elle a commis une grosse bêtise. Il décide alors, après lui avoir téléphoner, de rendre Cate à sa mère qui n'arrive pas à croire à toute cette histoire.
Raconté par Cate à le première personne, ce livre nous entraîne dans un road-movie psychologique un peu malsain avec comme fond d'écran le désert de l'Ouest américain.
Même si les relations entre kidnappeur et kidnappée semblent être celles d'un père avec sa fille, elles restent très particulières par la dépendance et l'attachement sans borne de Cate à cet homme.
La relation que nouent la mère et la fille est tout aussi curieuse. La mère réclame des tests ADN, entreprend avec sa fille une pseudo-quête de vérité pour pouvoir l'aimer .
Les questions que posent le début du livre sont pourtant assez prometteuses, à savoir l'absence, l'amour filial, le manque, le pardon, la transmission. Elles restent sans réponse ou plutôt sans débat.
La voix de Cate qui parle tout au long de ce roman ne bouleverse pas, elle bouscule par son rythme vif mais il n'y a pas de véritable sensibilité.
L'histoire accumule sans doute trop de situations insupportables ou insurmontables et j'ai pris un peu de distance.
C'est très malsain. J'ai ressenti des zones d'ombre et je me suis trouvée au centre d'une intrigue qui m'a échappée comme elle a dû échapper à l'auteur.


mercredi 14 avril 2010

Patrick Modiano : L'horizon

La nostalgie, les souvenirs et le passé font partie de la vie littéraire de Modiano et son dernier livre nous entraîne une fois de plus dans ces corridors du temps que l'auteur aime tant emprunter.
Ce qui aurait pu être et qui n'a pas été, des questions toujours et une fin qui s'ouvre sur une nouvelle histoire. Horizon, Modiano nous le promet cette fois.
C'est l'histoire de Bosmans et de ses souvenirs qu'il appelle inlassablement et de son histoire amoureuse avec Margaret Le Coz. C'est un couple fragile, flou comme le temps, sans lien avec le présent ou même le passé. Ce sont des héros d'une insaisissable délicatesse se promenant sur le fil de la nostalgie, entre murmures du passé et souffles du présent.
Le passé resurgit par bribes et petit à petit comble le puzzle de la vie. Jean Bosmans note dans un carnet des épisodes du passé et un nom, une rue lui rappellent Margaret Le Coz. Tous les deux se cachent à l'époque d'un passé inquiétant. Dans les rues de Paris et Berlin où tout sera sans doute possible, l'auteur nous entraîne comme toujours dans ses ballades au bout de la nuit à la recherche de ce qui n'est plus.
Il y a toujours ce café ouvert si tard qu'il n'y a plus d'heure et où se retrouvent toutes les solitudes. Il y a toujours ce je ne sais quoi qui nous enchante et distille la petite musique des mélancolies. L'intrigue est ténue et Modiano nous livre une fois encore son pur jus !
Et si un jour, dans son prochain livre, il se passait vraiment quelque chose.....


dimanche 4 avril 2010

Laurent Binet : HHhH

Chez les SS on le nommait : "HHhH" : Himmler Hirn heisst Heydrich qui veut dire Le cerveau d'Himmler s'appelle Heydrich.
Bras droit d'Himmler, la cruauté à l'état pur, la bête blonde, planificateur de la solution finale, l'homme le plus dangereux du IIIè Reich, le bourreau de Prague, véritable machine de guerre et de destruction, aucun état d'âme, un monstre.
Prague 1942, Heydrich nommé protecteur de la Bohème-Moravie y fait régner la terreur, une mission est menée par le gouvernement tchèque en exil à Londres pour l'assassiner. C'est l'opération "Anthropoïde" et nous suivons les deux parachutistes tchèques chargés de le tuer.
C'est un roman historique très fort et très original. L'auteur nous fait participer à son écriture, à ses interrogations et doutes d'écrivain face à la vérité historique. Des années de travail, de recherches, d'enquêtes pour réaliser le projet d'une vie.
L' Histoire renforcée par la fiction mais en aucun cas changée. Laurent Binet s'est complètement investi dans une aventure historique et littéraire. Les faits sont réels, et les dialogues inventés ne le sont peut être pas, tant sa recherche est intense.
Le lecteur suit aussi la vie de l'auteur avant et pendant l'écriture et comprend combien le travail d'un écrivain est difficile quand il veut faire de la fiction une vraie page d'Histoire.
C'est audacieux et très intelligent. Le lecteur apprend beaucoup de choses sur les participants à cet attentat et leur quotidien de très jeunes hommes, ceux qui les ont aidés, leur foi en un avenir.
C'est un livre très surprenant et passionnant à lire jusqu'à la dernière ligne.