je veux encore rouler des hanches,

je veux me saouler de printemps

je veux m'en payer des nuits blanches

à cœur qui bat, à cœur battant

avant que sonne l'heure blême

et jusqu'à mon souffle dernier

je veux encore dire "je t'aime"

et vouloir mourir d'aimer

Barbara

dimanche 21 novembre 2010

Maylis de Kerangal : Naissance d'un pont

C'est l'histoire de la construction d'un pont autoroutier ainsi que celle des hommes et femmes associés à cette prodigieuse entreprise. Le chantier se situe quelque part en Californie, dans une ville imaginaire Coca, un trou perdu. En reliant les deux rives du fleuve, la construction du pont met en scène des destins, des enjeux politiques et économiques, des luttes sur fond de bouleversement de l'écosystème et de la future condition de vie des Indiens vivant dans la forêt.
Jusqu'à son inauguration, le lecteur découvre la naissance du pont, ses forces et ses faiblesses et côtoie les protagonistes au coeur de leur vie dans ce qu'il y a de plus intime.
C'est un sujet très original, le pont servant de décor à ce roman avec tous ces héros aux personnalités fortes, rares et attachantes qui convergent vers leur destinée. Venant des quatre coins du monde, ingénieurs, grutiers, architectes, spécialiste du béton...tous vont se croiser, se déchirer, se soutenir pendant cette construction.
La description des paysages est très aboutie, et la forêt avec son dégradé de vert, d'ombre et de lumière est très envoûtante. Que ce soit au sommet de la grue, dans les entrailles du pont la vue de la ville est remarquablement bien décrite.
Prix Médicis 2010 pour ce roman, Maylis de Kerangal possède une écriture vive, nerveuse, précise aussi organisée que ce chantier gigantesque.
Beaucoup de termes techniques précis ainsi que la description des origines de la ville peuvent lasser mais l'auteur sait nous captiver par son style et son rythme et l'histoire reprend vite.




samedi 6 novembre 2010

Michel Houellebecq : La carte et le territoire

Prix Goncourt 2010 pour ce roman sorti sans agitation et pour lequel l'auteur surprend pas son excès de modération. Sans putes, sans partouzes, sans sexe et sans provocation il n'en reste pas moins un livre très visionnaire. Servi par une écriture fluide, recherchée et compréhensible, le roman offre un ton plus désabusé et certainement plus sombre.
La construction littéraire est originale et surprenante. Autant de tiroirs à ouvrir, autant de jeux de miroirs vont permettre à l'auteur de réaliser un autoportrait saisissant, parfois comique, parfois surprenant en tout cas plus humain.
C'est l'histoire de Jed, artiste qui devient célèbre après avoir rencontré et perdu une jeune femme russe, Olga. Il deviendra ou essaiera de devenir l'ami de l'écrivain Houellebecq, retiré en Irlande rangé et revenu de tout pour disparaître complètement. Le lecteur croise la route du père de Jed, d'un inspecteur de police sans enfant mais père d'un bichon. Enfin tout l'univers de l'auteur est là. Il aborde comme un sociologue tous les problèmes de notre société d'une façon magistrale : l'art, l'argent, l'amour (jamais là quand il faut), la vieillesse, la fin de vie, la solitude enfin tous les murmures de la vie.
Si l'on croise des "people"après tout pourquoi pas ? Ils sont vus partout par des millions de personnes.
C'est un livre sombre avec un humour un peu acide parfois, Houellebecq le confirme , comme ses héros qui représentent des portraits de l'auteur (Jed, le père même le chien "Michou") il est loin du monde et de ses griffes. Il se veut plus calme (crise de la cinquantaine ?) et n'attend plus rien.
J'ai préféré le ton plus percutant et dérangeant de son roman "Les particules élémentaires", c'était un livre très audacieux.




vendredi 5 novembre 2010

Sofi Oksanen : Purge

Prix Femina Etranger 2010, Sofi Oksanen débute son roman Purge en 1992. Avec l'effondrement de l'Union Soviétique, l'Estonie fête le départ de l'armée russe. D'abord annexé par l'Allemagne en guerre, le pays subira à partir de 1940 plus de 50 ans d'occupation communiste soviétique. Une vie sous surveillance où les mots n'existaient pas pour dénoncer les souffrances physiques et psychologiques subies.
A travers le destin de deux femmes nous comprenons peu à peu le prix de l'existence de ces épouses, mères, filles dans la tragédie de l'histoire. L'écriture est perspicace et devient un véritable suspense que le lecteur suit jusqu'au bout.
Aliide, vieille femme devenue la mémoire de l'ancienne Estonie, nous entraîne dans les secrets de sa vie. Elle s'est adaptée à l'histoire pour cacher son histoire de coeur. Trahison, mensonge, silence, accusation, les conditions de vie sont dures et insoutenables. Sa rencontre avec Zara, jeune russe échouée dans son jardin, fuyant son proxénète lui apportera un nouveau souffle.
Un lourd secret de familles lié à cette période de l'occupation soviétique les unira malgré elles.D'abord réticente, Aliide aura une largesse d'esprit dans son écoute et revivra alors des souvenirs dramatiques. L'histoire d'amour qu'elle a ratée a été source d'actes de collaboration. Terrible et douloureux dilemme.
Si le livre retrace la tragédie de l'Estonie pendant ses années les plus sombres (1940-1990), il interroge aussi et pose de bien embarrassantes questions. Comment en effet vivre dans un pays occupé ? Jusqu'où peut-on aller sans se compromettre ? Trahisons, actes de collaboration qui peut ou doit juger une fois les occupants partis ?
Ce livre est un témoignage bouleversant sur la condition des femmes dans un pays occupé et un récit remarquable sur l'histoire de l'Estonie.