je veux encore rouler des hanches,

je veux me saouler de printemps

je veux m'en payer des nuits blanches

à cœur qui bat, à cœur battant

avant que sonne l'heure blême

et jusqu'à mon souffle dernier

je veux encore dire "je t'aime"

et vouloir mourir d'aimer

Barbara

vendredi 26 juin 2015

Milena Busquets : Ca aussi, ça passera

     Le livre de chevet de l'été est arrivé avec la sortie du livre de Milena Busquets, "ça aussi, ça passera".
     Édité dans la très belle collection du Monde de Gallimard, le récit semble prometteur. Et pourtant... on arrive presque à s'ennuyer du destin de cette jeune femme, Blanca, la narratrice.
      Blanca, la quarantaine, vient de perdre sa mère après une longue maladie.
     Très éprouvée, elle n'arrive pas à surmonter le deuil. De sa mère qui "ne portera plus un regard sur elle", mais à qui elle continue de parler et d'évoquer, elle dira qu'elle était "la femme de sa vie".
     Une mère belle, libre mais autoritaire et égoïste dont l'évocation et les souvenirs tenaillent Blanca dans une tristesse et une solitude profonde.
    Pour faire son deuil et se sortir de ce moment douloureux, elle décide d'occuper la maison familiale de Cadaquès.
   Premier été sans sa mère, c'est accompagnée de ses deux garçons, des deux pères différents, de ses amies et aussi d'amants présents et à venir que Blanca parviendra à rester dans la vie.
      Le chagrin, le deuil, l'amour et le bonheur ;  ça aussi, ça passera. Aussi elle fera de cet été sans elle, celui de la quête de ses sens.
      Récit de l'intime, de la chaleur des jours et des nuits, des rencontres qui se font et se défont et du sexe qui guérit même fugitivement tous les maux.
     Blanca se veut frivole, légère à la vie et aux autres. C'est un hommage à la fête, à l'amour et à une certaine façon de considérer la vie comme un jeu. Un jeu qu'il faut vivre parce qu'un jour tout s'arrête.
     Il y a beaucoup de thèmes chers aux vacances et au soleil, comme la séduction, l'amitié avec ces repas bien arrosés, mais aussi le chagrin, la solitude et la jalousie.
     Quelques phrases se veulent des pensées profondes, mais l'histoire dans son ensemble reste trop superficielle.
     Peut-être comme Blanca, même si le chagrin et l'amour qu'elle porte à sa mère sont authentiques, le reste baigne dans une atmosphère très futile.
Milena Busquets - Ca aussi, ça passera - Editions Gallimard "Du monde entier" - 192 pages - 17 Euros

mardi 23 juin 2015

Ron Rash : Incandescences

     Ron Rash fait partie des grands auteurs américains contemporains. Né en 1953 en Caroline du Sud, il a choisi la nouvelle comme genre littéraire à son dernier ouvrage.
     Avec certaines nuances dans la qualité, elles possèdent toute le style Ron Rash dont l'écriture nette nous transporte sur ces terre oubliées du rêve américain.
     Nourries de la nature brute et sauvage des Appalaches, qu'il connaît bien, les nouvelles racontent à des périodes et des saisons différentes la vie de gens pauvres tous  porteurs de valeurs humaines, mais qui malgré eux sont confrontés à leur délitement.
     De la guerre de Sécession en passant par les années 50, les personnages depuis leur naissance se battent pour survivre, dans la misère et la violence, la mort devient parfois nécessaire.
     Beaucoup de misère et des destins qui basculent dans le meilleur comme dans le pire. On y vole des oeufs pour ne pas mourir de faim, on pille des tombes pour soigner sa mère.
     Du courage et un certaine pugnacité pour s'en sortir malgré la Grande Dépression qui a plongé les habitants de cette contrée dans la plus grande des misères.
     Et puis, la chute de ces êtres perdus à qui il n'a pas été beaucoup donné.
     Beaucoup de méthamphétamine pour aider à se sortir d'un quotidien sans horizon. La nouvelle "l'Envol" bouleverse par l'amour de ce petit garçon pour ses parents perdus dans la déchéance de la drogue. Un style poétique pour une fin terrible, un amour impossible à donner.
     Dans ces nouvelles, Ron Rash nous transmet l'esprit de la culture ancienne difficile à concilier avec la société moderne dans laquelle toutes les valeurs ont été bousculées.
     Un livre poignant, très fort pour connaître les contrastes qui font l'Amérique.
Ron Rash - Incandescences - Editions Seuil - 202 Pages - 20 Euros


lundi 15 juin 2015

Anthony Doerr : Toute la lumière que nous ne pouvons voir

     Récompensé par le prestigieux Prix Pulitzer 2015, le dernier roman d'Anthony Doerr, Toute la lumière que nous ne pouvons voir, nous entraîne dans le destin de deux jeunes héros emportés dans les heures les plus sombres de l'Histoire, celles de l'Occupation.
     En Août 1944, Saint Malo reste encore un bastion allemand. Des tracts pleuvent sur la cité corsaire prévenant les habitants de la prochaine attaque des bombardiers américains.
     Le pilonnage sera destructeur mais la ville libérée.
     Dans la maison de son oncle Etienne où elle s'est réfugiée avec son père en 1940, Marie-Laure, jeune aveugle de 16 ans se cache dans une armoire avec un fonds spécial. Rentrée dans la résistance avec son père qui s'est fait arrêté, elle aide son oncle à envoyer des messages à l'aide d'une radio cachée au grenier.
     De son côté, Werner, soldat allemand spécialiste des transmissions radio est chargé de traquer les résistants.
     C'est pendant cette journée décisive que nos héros vont se rencontrer une seule fois pour se perdre à jamais.
     Le récit habilement mené par des chapitres très courts, remonte le temps et alterne l'histoire des deux protagonistes.
     Partant de 1934, les flash back donnent un rythme soutenu et situent les héros dans leurs vies au même moment, en Allemagne pour Werner et en France pour Marie-Laure.
     Werner, jeune allemand aux cheveux blancs, orphelin et génie des transmissions radio, sera remarqué par la Werhmacht. Recruté dans une école d'élite qui lui évitera de finir dans la mine comme son père, il fera partie de cette jeunesse prise dans la barbarie hitlérienne.
     Marie-Laure vit à Paris avec son père, serrurier au Muséum d'Histoire Naturelle. Devenue aveugle, il fera tout pour la protéger et la rendre indépendante.
     Avec une histoire magique de diamant bleu appelé le Sea of Flame, dans les jardins du Muséum d'Histoire Naturelle ou dans la cité malouinne livrée au crépuscule, le lecteur assiste à la marche de l'histoire hantée par le Clair de Lune de Debussy.
     Car ce qui fait la force de ce récit c'est le choix qui est donné à chacun de faire de sa vie une mélodie.
     C'est le questionnement face à la violence et à la haine et à ces rencontres qui restent uniques et durables.
     Un roman qui se lit facilement, un style fluide, simple, un peu trop facile pour un prix que j'aurais aimé plus complexe.
     Mais le livre reste lumineux même si parfois il frôle le mélo.
     La construction en courts chapitres est intéressante parce qu'elle rend le récit addictif mais en le rendant trop prévisible, surtout à la fin.
Anthony Doerr - Toute la lumière que nous ne pouvons voir - Editions Albin Michel - 610 pages - 23.50 Euros

mercredi 3 juin 2015

Henning Mankell : Daisy Sisters

     Suède années 1980. Evior a 39 ans, elle est conductrice de pont roulant, un travail particulièrement dur. Elle a eu trois enfants de pères différents et vit avec Peo, son dernier compagnon, veilleur de nuit.
     Evior est la voix du livre, c'est par elle que passe le récit poignant de sa vie, de celle de sa mère, Elna, mais aussi de ces  femmes qui comme elle ont eu des rêves et des envies.
     C'est tout simplement l'éternelle histoire d'une vie qui débute mal et qui n'arrête pas de dérailler.
     Avec elle, nous  remontons le temps pour comprendre comment tout a commencé, en 1941.
     A 17 ans, Elna et Vivi, décident d'aller se balader en vélo près de la frontière entre la Suède et le Danemark. Elles se surnomment les Daisy Sisters,clin d'oeil à une lointaine Amérique et resteront amies pour toujours.
     C'est la guerre et elles font la connaissance de jeunes soldats suédois.
     Elna subit un viol et tombe enceinte, elle voit son destin bouleversé à jamais. A l'âge de l'insouciance, elle est confrontée à une société figée où l'avortement est illégal. 
     Elle donne naissance à Evior avec qui elle entretiendra des relations difficiles. 
     A son tour Evior décide de prendre sa vie en main. Elle quitte la maison pour devenir une couturière.
     Nous suivons sa vie faite de bonnes et de mauvaises rencontres et d'un chemin difficile.
     Elle fera tout pour ne pas vivre la vie de sa mère, mais le destin la rattrapera tout aussi brutalement.
     Henning Mankell oublie sa verve policière pour nous dépeindre une société en mutation. Si les époques changent, les femmes semblent toujours se débattre avec une réalité souvent cruelle.
     Être femme, mère, épouse, ouvrière et conserver ses rêves et ses envies est très difficile.
     Les personnages aussi évoluent, et l'auteur dépeint parfaitement les idéologies qui restent ancrées comme la difficile égalité dans le travail, la question de l'avortement, la place de la femme dans la société ou tout simplement dans sa propre famille.
     A noter, que c'est le tout premier livre d'Henning Mankell, paru en 1982 et enfin traduit en français.
     Point de légendaire inspecteur Wallander mais une société suédoise décortiquée, fouillée qui dépeint la condition féminine et ouvrière.
     C'est sombre et cruel, souvent triste mais l'histoire de ces femmes est touchante.
     On reste derrière elles, juste au cas où....
Henning Mankell - Daisy Sisters - Editions Seuil - 522 pages - 22.50 Euros