je veux encore rouler des hanches,

je veux me saouler de printemps

je veux m'en payer des nuits blanches

à cœur qui bat, à cœur battant

avant que sonne l'heure blême

et jusqu'à mon souffle dernier

je veux encore dire "je t'aime"

et vouloir mourir d'aimer

Barbara

lundi 30 janvier 2012

Nosaka Akiyuki : La tombe des lucioles

Grâce à cette nouvelle, récompensée par le prix le plus prestigieux au Japon, le Prix Naoki en 1968, l'auteur remporte la célébrité.
Il nous raconte à travers l'histoire de deux jeunes orphelins, le terrible bombardement de Kobé en 1945. L'Histoire est en marche et le Japon sombre dans une des périodes les plus douloureuses, c'est la fin de l'innocence.
Critique de la guerre, de l'Amérique mais aussi pamphlet contre le patriotisme aberrant et violent dans lequel sombre son pays, Nosaka analyse dans un style sombre et efficace la solitude et la culpabilité.
Pendant les bombardements de Kobé Seita et sa jeune soeur Sutseko voient disparaître leur mère. Fuyant la ville pour trouver de l'aide auprès de la famille, les enfants se trouvent confrontés à un monde de destruction. Nosaka nous raconte leur poignante agonie dans une ville dévastée. Avec une grande sensibilité et beaucoup de pudeur, il montre la tendresse et l'amour infini de Seita pour sa soeur. Il essaiera jusqu'au bout de lui redonner envie de rêver, de jouer comme une petite fille.
En commençant le récit par la mort du grand frère, l'auteur indique qu'ici il n'y a pas d'espoir.
L'écriture nous touche particulièrement par ses longues phrases mais aussi par son vocabulaire populaire et argotique. La douleur devient humaine.
La seconde nouvelle, Les algues d'Amérique, contraste avec un ton plus ironique et humoristique. Elle laisse au lecteur une impression d'illusion perdue et d'amertume acerbe.
C'est l'histoire d'un couple japonais qui 20 ans après la guerre, reçoit un couple d'américains.
Choc des cultures, rancoeur et fascination pour l'Amérique, vainqueurs et vaincus d'un passé pathétique.
Deux nouvelles à savourer.


dimanche 29 janvier 2012

Joyce Maynard : Les filles de l'ouragan

C'est l'histoire de Ruth et Dana, nées toutes les deux un 4 Juillet 1950 dans un petit village du New Hampshire. "Soeurs d'anniversaire" conçues par une nuit d'ouragan, elles n'ont pourtant rien en commun.
Ruth est une des cinq filles d'agriculteurs attachés à leur ferme depuis plusieurs générations. Elle développe très tôt un sens artistique et voue un véritable amour pour la terre familiale. Sa mère n'a jamais éprouvé de tendresse pour elle, elle se sent plus proche de son père.
Dana vit dans une famille de pseudo artistes au le style bohème. Ses parents font ce qu'ils peuvent en tout cas ce qu'ils veulent. Alors de déménagement en déménagement, ils se lancent dans des vies toutes prometteuses mais qui n'aboutiront jamais. La mère peint et vit dans son monde. Elle a du mal à s'intéresser et comprendre sa fille.
Malgré ces différences de vie, de style, les parents, surtout la mère de Ruth, continueront de se rendre visite. Les dates anniversaire seront un prétexte pour se rencontrer et échanger des nouvelles des filles qui ne s'apprécient pas vraiment.
Tout au long de leur vie, les personnages tisseront un lien invisible jusqu'au dénouement final, quand la mort délivre de secrets enfouis.
L'histoire est sans doute prévisible mais elle est construite de courts paragraphes que se partage chacune des héroïnes. Intenses, ils donnent au récit une alternance dans la sensibilité des personnages.
L'auteur survole des tas de questionnements, sur la drogue, l'homosexualité, la religion mais elle le fait d'une façon pudique et légère. Elle laisse ses héros face à la cruauté de la vie . Tout au long du chemin, ils s'arrangent de la déception des sentiments, du poids du passé et du silence des secrets. Ils poursuivent leur course folle et vue de haut, l'esquisse est très belle.
De 1950 à nos jours, Joyce Maynard, sans tomber dans l'étude psychologique dresse une belle saga familiale faite de petites et grandes choses où la fuite en avant est une réponse à toutes les angoisses.

samedi 14 janvier 2012

Jean-Philippe Blondel : Et rester vivant

L'auteur nous livre dans un poignant récit écrit à la première personne, un texte bouleversant et sensible sur ses années de très jeune adulte. Orphelin à 22 ans il devient l'unique survivant d'une famille fantôme.
Sa mère et son frère sont morts dans un accident de voiture. Son père s'en est sorti, il conduisait. L'auteur avait préféré prendre le train, n'appréciant pas la conduite paternelle, trop sportive. Entre son père sombrant dans une profonde dépression et lui, une relation très violente et destructrice s'installe. Quatre ans plus tard, son père se tue en voiture.
Anéanti, perdu dans l'enfer de la douleur il affronte la perte de ses chers disparus, la culpabilité de celui qui n'est pas mort et de devoir trouver une bonne raison de continuer.
Héritier d'une famille décimée, de souvenirs d'enfance ravagée et de deuils cruels, il essaiera dans une quête, loin de son quotidien, de découvrir de nouvelles sensation d'être en vie.
Les chansons de Lloyd Cole le guideront à Morro Bay, sur la route américaine mythique menant au bout de tous les possibles. Accompagné de sa future ex petite amie et de son meilleur ami, il effectuera un voyage qu'il veut solitaire . Petit à petit, il refermera une dernière fois les portes de son chagrin, de sa mémoire brisée. Il se souviendra des moments de douceur avec ses parents, de son frère à jamais figé dans son éternelle jeunesse, des tensions et chagrins que chacun portait en lui, pour se créer sa nouvelle vie.
L'auteur met beaucoup de sensibilité dans ce livre, il touche au plus près de l'émotion. Les phrases courtes nous entraînent dans une grande réflexion sur le devoir de mémoire, sur la reconstruction. L'auteur touche l'intime et c'est un grand moment d'émotion.



vendredi 13 janvier 2012

Jonathan Franzen : Les Corrections

Pour ce roman l'auteur a été récompensé du National Book Award en 2001. L'éternel "famille je vous hais" dénonce ici une famille américaine du Midwest. Tout est dit, et le lecteur plonge dans un univers familial explosé par la distance, l'inévitable éloignement faisant de ses membres de purs étrangers.
Jonathan Franzen fouille, décortique, analyse chacun des protagonistes dans leurs quêtes du bonheur, de la respectabilité, des convenances, de la réussite. Mais c'est aussi le portrait d'une Amérique impitoyable et décadente, adulant le profit et sombrant dans la crise financière, responsable de grands maux.
La famille Lambert vit dans le Midwest, les parents ont eu une réussite très respectable évoluant dans un monde d'apparence et de bigoterie. Les trois enfants ont tout fait pour ne pas leur ressembler et dans une quête vaine ont manqué le grand tournant de leur vie. Mais quitter sa région et ses parents ne signifie pas réussir sa vie et d'autres rencontres les ont marqués et parfois brisés. Chip, l'aîné, accumule les échecs et court après une improbable gloire. Denise, chef de cuisine reconnu, essaie d'être la fille modèle et de ce fait a du mal à reconnaître son homosexualité et Gary le seul ayant réussi sa vie professionnelle et familiale et qui sombre dans la dépression.
C'est autour de Noël, fête de famille par excellence, que culmine l'histoire et c'est savoureux d'exactitude et d'humour.
L'auteur nous décrit dans les moindres détails l'histoire de cette famille, ses secrets, ses fantasmes tout est montré et nous frémissons devant ce réalisme.
Franzen s'attache, comme le lecteur, aux personnages et malgré leurs défauts, il leur trouve des faiblesses, des peurs, des craintes qu'ils essaieront pendant leur vie de corriger.
Mais c'est l'intolérance de l'Amérique face à ceux qui ne lui ressemblent qui est dénoncée ici.
Un très bon livre sur une époque, un pays et une famille finalement ordinaire.